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La revue de presse mensuelle et gratuite sur la forêt et la nature

Comprendre la sensibilité spécifique des essences forestières aux perturbations est essentiel pour prédire l’évolution de nos écosystèmes forestiers dans le contexte des changements climatiques. À partir de données issues des inventaires nationaux français, espagnol et finlandais, des chercheurs ont modélisé la probabilité de mortalité de 40 espèces d’arbres européennes sur base de différents caractères.

L’étude montre que la sensibilité des espèces aux perturbations s’explique assez bien par la combinaison de différents caractères. La résistance au feu, par exemple, est en lien avec la dimension de l’arbre : les petits individus résistent moins au feu que les gros. Les espèces sensibles au feu ont aussi une écorce fine, sont peu tolérantes à l’ombre et ont un rapport C/N de leurs feuilles élevé.

Les espèces sensibles aux tempêtes ont un rapport hauteur sur diamètre à 1,30 m (H/d) élevé, un bois de faible densité et une forte croissance en hauteur.

Chez les résineux, la sensibilité aux tempêtes augmente avec la tolérance à l’ombre, et la sensibilité au feu diminue avec la densité du bois.

Quel que soit le type de perturbation, les résineux sont les plus sensibles et les feuillus, principalement du genre Quercus, les moins sensibles.

L’étude a identifié des relations clés entre les traits fonctionnels des espèces et leur sensibilité aux perturbations, qui permettent des prédictions plus fiables sur l’évolution de la structure et de la composition de la forêt future à une large échelle spatiale. Elle trouve une synergie entre les stratégies menant à une haute résistance aux différentes perturbations et différents traits tels qu’un bois de haute densité ou une croissance faible. Par exemple, une forte densité de bois va limiter la propagation de la pourriture dans les arbres blessés suite à une perturbation et augmenter la résistance à la cavitation dans le xylème, donc la résistance à la sécheresse.

Ils constatent que la plupart des traits associés à une forte sensibilité aux perturbations caractérisent plutôt des espèces productives. Les forestiers peuvent donc s’attendre à ce que, à l’avenir, la sélection porte sur des essences moins productives mais plus résistantes.

La revue Forêts de France propose un dossier spécial sur le frêne. L’occasion de partager quelques informations importantes à son sujet.

Le frêne connaît d’importants dépérissements en Europe depuis les années 1990. En cause : la chalarose, une maladie importée par un champignon est-asiatique. Ce champignon affecte normalement seulement les feuilles des frênes. La particularité du contexte européen est que, ici, le champignon ne s’arrête pas dans la feuille, mais affecte aussi les tissus lignifiés.

Une gestion sylvicole adaptée est essentielle pour maintenir le frêne dans nos forêts : favoriser le mélange ; ne pas se précipiter, éviter les coupes fortes et massives ; observer les arbres et conserver aussi longtemps que possible les arbres sans symptômes.

« Le frêne ne va pas disparaître de nos forêts ». Face à un nouveau pathogène, il ne faut pas se précipiter. Il est préférable d’observer comment la communauté fongique évolue, des champignons antagonistes peuvent alors apparaître et limiter l’infection foliaire. Certains frênes se montrent plus tolérants face au pathogène. Les scientifiques estiment à environ 2 % la part de frênes communs capables de lutter contre ce champignon.

Le bois de frêne présente un fil droit, une couleur claire et d’excellentes propriétés mécaniques : une grande élasticité combinée à une bonne résistance. Il présente une bonne aptitude au cintrage, il est réputé pour la fabrication de manche d’outil de grande qualité, de mobilier, d’escalier, de plancher, de matériel de sport (luges, raquettes de tennis, skis)… Le bois des frênes chalarosés reste exploitable. Le champignon est en effet absent de la grume, en dehors des nécroses localisées dans les rameaux et au collet.

Le tout nouveau parc national ESEM couvre 22 000 hectares et est réparti sur cinq communes (Chimay, Couvin, Froidchapelle, Momignies et Viroinval) et 3 régions naturelles : l’Ardenne, la Calestienne et la Fagne. Forte de 76 partenaires régionaux, l’approche ouverte et participative a permis d’inclure dans le périmètre des terrains et forêts des 5 communes, mais aussi des réserves naturelles domaniales (RND) et agréées (RNA), ainsi que des terrains associatifs et privés, qu’ils soient forestiers ou agricoles.

Cette dynamique se poursuit en invitant les propriétaires privés à y adhérer. L’ajout d’un terrain dans la zone cœur du Parc par un propriétaire privé ou public est assorti de la signature d’une charte à plusieurs niveaux, qui tend vers un maximum de naturalité dans ces espaces, via une approche souple et concertée. Le but est d’augmenter la continuité des milieux naturels qui constitue un élément clé pour la résilience des écosystèmes et la sauvegarde de la biodiversité. 1000 hectares de terrains privés sont ainsi déjà inclus dans le périmètre du Parc.

Le monde agricole est notamment concerné. Le Parc national ESEM s’engage à le soutenir dans une transition agroécologique, grâce à des aides aux restaurations botaniques en prairie ou sur pelouses calcaires, à la plantation de vergers et de haies, au creusement de mares, à l’aménagement d’étangs ou encore au placement de nids à cigogne.

Le bois est utilisé dans la construction depuis des siècles. Bien qu’il ait été remplacé par d’autres matériaux au cours du temps, il est très loin d’être obsolète. De plus en plus remis sur le devant de la scène pour ses qualités environnementales, il n’en est pas moins un matériau moderne répondant aux besoins techniques de notre temps tout en respectant les normes les plus strictes de sécurité.

Les tests de résistance, d’élasticité, de durabilité… montrent de plus en plus que le bois est capable de rivaliser voir concurrencer l’acier ou le béton. Et lorsque les qualités du bois scié ne sont pas suffisantes, les produits bois recomposés viennent combler ces lacunes.

Cet article scientifique fait un état des lieux des différentes propriétés mécaniques du bois et présente la bibliographie associée.

Avec l’extension de ses populations dans une grande partie de l’Europe, la surveillance des castors eurasiens (Castor fiber) devient de plus en plus nécessaire. C’est dans ce cadre qu’une étude menée en Norvège a examiné la précision de l’identification et de l’évaluation de l’âge des castors à partir de photographies de la queue. En effet, cette méthode non invasive de détermination de l’âge des castors à partir de la couleur de la queue (la couleur devenant plus claire au fur et à mesure que le castor vieillit) existe déjà, mais est basée sur des observations de castors d’Amérique du Nord. Comme ils sont morphologiquement similaires, les chercheurs s’attendaient à ce qu’une tendance similaire soit observée chez le castor d’Eurasie.

Les chercheurs ont utilisé un échantillon important de photographies venant d’un site de la région de Telemark, qui abrite aujourd’hui le « Norwegian Beaver Project », l’un des plus anciens projets sur le castor, qui a débuté en 1997. Ils ont étudié deux caractéristiques : le motif des écailles et la couleur de la queue.

Les résultats suggèrent que cette méthode pourrait être utilisée comme méthode non invasive d’identification individuelle pour le suivi des populations de castors car la précision de l’identification individuelle est de 100 %. Cependant, la méthode est inefficace pour évaluer l’âge des castors.

D’après un rapport publié le 10 avril dernier par le Centre commun de recherche de la Commission européenne, plus de 500 000 hectares de terres ont brûlé dans l’Union européenne en 2023. Ce qui fait de l’année dernière la quatrième pire année depuis 2000 pour les incendies de forêt.

Outre un total d’environ 120 000 hectares de feux de forêt, 37 % des incendies survenus en Europe en 2023 ont principalement brûlé des arbustes et la végétation à feuilles coriaces des régions méditerranéennes. Dans ces zones, les incendies forestiers ont eu lieu pendant l’été et jusqu’en octobre.

Les feux de forêt de 2023, outre leur caractère dévastateur pour la nature et les humains, ont aussi relâché quelque 20 mégatonnes de CO₂ dans l’atmosphère, causant d’autres dommages environnementaux.

La revue ornithologique du pôle Aves de Natagora fait la part belle à deux rapaces nocturnes mystérieux : la chevêche d’Athéna et le grand-duc d’Europe.

Et une bonne nouvelle : la chevêche d’Athéna, petite chouette typique des paysages bocagers et des vergers, prospère à nouveau en Famenne ! C’est en partie grâce au travail d’un petit groupe de passionnés qui lui construisent depuis 12 ans des nichoirs cinq étoiles pour mener les nichées à bien. Résultats : 497 nidifications suivies et 1727 jeunes oiseaux prêts à l’envol observés ! En moyenne, cette petite chouette localement menacée élève ainsi 3,5 poussins par nichée : une reproduction tout à fait remarquable pour cette espèce. Pour la préserver, le maintien de vieux arbres dans les pâturages est essentiel.

Grâce à un suivi par balises de trois jeunes femelles de Grand-duc d’Europe, de nouveaux éléments sur l’écologie du plus gros rapace nocturne du monde ont également été découverts. Par exemple, il semblerait que les femelles s’installent dans une « zone de stationnement temporaire » avant de chercher le contact avec des couples installés. L’une des femelles suivies a même niché avec succès au sol, au pied d’un arbre. Pendant la couvaison, les femelles peuvent rester quasi immobiles pendant environ 1 mois !

À l’heure où les forestiers s’interrogent sur la sylviculture à mener face aux changements climatiques, le « Guide des stations d’Ardenne » apporte un éclairage sur les potentialités et sensibilités sylvicoles de dix-sept grands types de stations ardennaises, depuis la tourbière jusqu’au versant chaud au sol superficiel, et y associe des conseils de sylviculture et des suggestions de choix d’essences.

Développé à Gembloux Agro-Bio Tech dans le cadre du Plan quinquennal de recherches et vulgarisation forestières et disponible à partir de l’été 2024, le Guide des stations forestières d’Ardenne est un nouvel outil à destination des gestionnaires forestiers, dans le prolongement du Fichier écologique des essences (fichierecologique.be). Il se base sur l’identification de types de station, en utilisant des critères simples, pour proposer des conseils de gestion adaptés qui intègrent les enjeux de durabilité et les contraintes climatiques.

Synthèse d’une solide expertise de terrain et du travail de plusieurs chercheurs, ce guide a pour objectif de faciliter la compréhension du territoire et des possibles qu’il offre au 21ᵉ siècle, en présentant l’information de manière compréhensible, centralisée et facilement utilisable sur le terrain. Il s’accompagne d’une version cartographique et de cartes thématiques dérivées. Premier tome d’une série, les prochains volumes couvriront la Fagne-Famenne-Calestienne, le Condroz-Thiérache et la Lorraine belge.

Disponible à l’été 2024 sur ediwall.wallonie.be.

Jean-Pierre Sorg, docteur en sciences naturelles et ingénieur forestier à l’École Polytechnique fédérale de Zurich, s’interroge sur l’évolution de la forêt suisse. Bien que protégée par une législation plutôt conservatrice qui défend une sylviculture proche de la nature, la forêt suisse lui semble confrontée à des pratiques de gestion qui s’éloignent de ces principes, telles que des dessertes excessives, des fortes coupes de bois ou des dégâts d’exploitation. Jean-Pierre Sorg se questionne également sur le manque d’informations données à la population, malgré la large gamme de produits et de services que la forêt offre à la société. En bref, l’ingénieur forestier s’inquiète de ces dérives, même s’il souligne que de nombreux gestionnaires et propriétaires continuent à faire leur possible pour maintenir une gestion proche de la nature.