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La revue de presse mensuelle et gratuite sur la forêt et la nature

Des données récentes mettent en lumière un type particulier d’intelligence des plantes. Les plantes ont développé des réseaux moléculaires complexes qui leur permettent de se souvenir, de choisir et de prendre des décisions en fonction de stimulus de stress, bien qu’elles soient dépourvues de système nerveux. Étant immobiles, les plantes peuvent exploiter ces réseaux pour optimiser leurs ressources de manière rentable et maximiser leur condition physique en réponse à de multiples stress environnementaux. Ce qui est encore plus intéressant, c’est la capacité à transmettre cette expérience aux générations suivantes par le biais de modifications épigénétiques qui s’ajoutent à l’héritage génétique classique.

Dans cet article d’opinion, les chercheurs présentent des concepts et des perspectives concernant les capacités des plantes à sentir, percevoir, se souvenir, réélaborer, répondre et, dans une certaine mesure, transmettre à leur progéniture des informations leur permettant de s’adapter plus efficacement au changement climatique.

Après s’être accru durant plusieurs décennies, notamment suite au recul de l’agriculture au profit des surfaces boisées, le puit de carbone forestier français se tarit depuis les années 2010 en raison de la hausse de la mortalité des arbres (sécheresses, incendies, maladies, hausse des prélèvements) et d’un ralentissement de leur croissance. À titre de comparaison, les forêts françaises ont absorbé en 2020 la moitié de ce qu’elles absorbaient en 2008. Ce phénomène, à propos duquel les scientifiques tirent la sonnette d’alarme depuis des années, commence à inquiéter la sphère publique.

En juin dernier, l’Académie des sciences a publié un rapport traitant des menaces pesant sur le puits de carbone forestier, mises en perspective avec la stratégie nationale bas-carbone (SNBC). Elle appelle à une révision urgente de celle-ci au risque de ne pas voir ses objectifs tenus. L’institution critique notamment le scénario « intensification » de la stratégie qui vise une hausse de 70 % des coupes de bois d’ici 2035, ce qui aurait pour effet de faire décroître le puits de carbone total dans les années à venir, en raison des émissions liées à l’exploitation et la transformation, même en tenant compte de l’effet de substitution.

L’Institut Économique pour le Climat et les associations Fern et Canopée avaient déjà soulevé ce risque lié à une intensification des récoltes de bois. Une mauvaise estimation du puits de carbone forestier peut mener à des erreurs de choix politiques. L’Académie des sciences met aussi en avant l’impact des coupes rases sur le puits de carbone et préconise une sylviculture à couvert continu, des densités de peuplement ajustées aux conditions hydriques ou encore la prise en compte de la résistance au feu des essences d’arbres et plaide pour les produits à longue durée de vie.

Les changements environnementaux comme le réchauffement climatique ou les dépôts azotés impactent les communautés microbiennes au sein des sols forestiers. Découvrir l’importance de ces phénomènes est crucial pour comprendre et prédire l’ampleur des changements qui impactent la vie du sol.

Les sols de plusieurs peuplements ont été soumis à différents traitements expérimentaux comme le réchauffement, l’ajout d’azote et une augmentation de la quantité de lumière reçue sous la canopée. Parmi tous les traitements, c’est en réalité l’historique des parcelles qui a le plus grand effet sur la structure de la communauté microbienne. Les forêts anciennes comportent une plus grande abondance de champignons endomycorhiziens et d’actinomycètes qui réalisent tous deux des symbioses ou du commensalisme avec les plantes, dont les arbres. Les communautés microbienne et floristique se sont co-construites dans les forêts anciennes, mais pas dans les forêts récentes. Le réchauffement et la fertilisation à l’azote n’a pas modifié la composition de la vie bactérienne du sol. L’augmentation de la lumière a quant à elle entraîné quelques changements.

Les résultats de l’étude montrent que le passé des forêts façonne les communautés microbiennes des sols. Les liens forts tissés entre ces communautés et les arbres dans ces forêts anciennes contribuent probablement à améliorer la résilience face à des changements environnementaux.

Supprimer la concurrence en périphérie et sous le houppier des chênes est reconnu comme une opération importante pour assurer une bonne vitalité des charpentières qui assure la survie et la conservation de l’arbre. Il y a cependant peu d’études sur la durée de ces effets dans le temps et leurs impacts sur les coléoptères qui vivent au moins une partie de leur cycle dans le bois.

Une expérience a été menée entre 2008 et 2018 dans une ancienne pâture plantée en chênes puis replantée partiellement en épicéas. Le peuplement actuel est une jeune pessière avec des chênes résiduels de 140 ans (maintenus lors de l’enrésinement). L’expérience consistait à suivre les effets de la concurrence entre les vieux chênes et les jeunes épicéas et à analyser les incidences sur la vitalité des chênes (croissance, quantité de branches mortes) et la composition, richesse et abondance des coléoptères saproxyliques.

Trois modalités d’éclaircie ont été appliquées en 2008 :

  • pas d’éclaircie (témoin)
  • coupe des épicéas sous la couronne des chênes
  • coupe des épicéas sous la couronne et jusqu’à 2 mètres de la périphérie des chênes.

 

Les observations notables sont:

  • La vitalité des chênes est meilleure lorsqu’une coupe d’éclaircie a été réalisée, avec des températures plus chaudes et plus de lumière.
  • À la suite des éclaircies, les couronnes ont colonisé l’espace aérien tandis que sans éclaircie la proportion de branches mortes est plus importante.
  • L’abondance et la richesse en espèces sont supérieures dans les modalités éclaircies.
  • Même 10 ans après les coupes, le gain de lumière sur le houppier, le tronc et l’écorce améliore la variabilité du microclimat, facteur important pour les coléoptères saproxyliques.
  • La composition en espèces est clairement différente entre les modalités avec et sans éclaircies.

 

Bien que le bois mort soit crucial pour héberger des coléoptères saproxyliques, la température est aussi une condition importante (qui pourrait compenser en partie un manque d’habitats dans les forêts de production). Des chênes sains fournissent des habitats plus durables et de meilleure qualité que lorsqu’ils sont comprimés et dépérissants. Il est donc important de veiller au maintien des vieux chênes et à leur survie en les soustrayant de trop fortes concurrences. Les mesures de conservation des coléoptères saproxyliques doivent ainsi prendre en considération la quantité de bois mort mais aussi son exposition au soleil.

Serait-il possible de diriger des flux d’air froid provenant des forêts pour refroidir les agglomérations ? Un projet pionnier de création de couloirs d’air froid dans une forêt en Suisse a vu le jour l’été dernier. Quatre couloirs de 30 à 100 mètres de long et de 20 à 30 mètres de large ont été créés lors d’une coupe de régénération ordinaire dans une forêt mixte. Bien qu’ils aient des proportions semblables, aucun n’est identique. Ces couloirs débouchent directement sur la maison de retraite Kehl, située en périphérie de la ville de Baden. Ce projet dénommé « Kühlwald » (forêt fraîche) a pour but de déterminer s’il est possible de diriger les courants d’air froid provenant d’une forêt pour refroidir une agglomération et lequel des quatre couloirs offre les meilleurs résultats.

En effet, la nuit, les forêts produisent ces courants d’air, grâce à l’évaporation de l’humidité. Ce processus commence à la tombée de la nuit et atteint un effet maximum à 4 heures du matin. Comme l’air frais est plus lourd que l’air chaud, il descend de la colline. La forêt de Baden est majoritairement située sur des crêtes et produit, par conséquent, lors des chaudes nuits d’été, de l’air froid qui s’écoule vers les habitations noyées dans la chaleur.

Un total de 22 capteurs de température ont été installés en 2023, avant la coupe de l’été, en différents endroits de la forêt, en bordure de celle-ci et dans la maison de retraite. La phase de mesure du projet durera 2 ans. C’est l’hiver prochain que sera décidé si ce projet pionnier, réalisé dans la forêt domaniale de Baden, ouvrira de nouvelles perspectives pour l’avenir.

Comme le blaireau est un animal plutôt nocturne, l’étudier dans son environnement naturel représente un véritable défi.

En Lorraine, grâce à des caméras placées dans un terrier pendant plus d’une décennie, des chercheurs ont pu mettre en lumière certains comportements originaux de ces mammifères forestiers.

Cet animal serait par exemple très impacté par la saisonnalité. La période hivernale serait le moment le plus propice pour leur reproduction avec une forte intensité constatée en janvier et en février. Les observations témoignent également d’un ramassage de litière plus important en fin d’hiver et en automne. Cela indiquerait même la présence de blaireautins au sein du terrier !

Les vers sont l’une des friandises préférées de ces animaux : il ne faudrait pas moins de trois cents vers adultes par nuit pour alimenter un seul blaireau !

Ces éléments relatifs aux blaireaux mettent en évidence leur sensibilité face aux saisons mais également les difficultés qu’ils pourraient rencontrer face aux changements climatiques à venir, si les sols de nos forêts s’appauvrissent et que les saisons sont perturbées.

L’année dernière, des scientifiques ont mis en évidence pour la première fois des maladies des racines et du tronc du genre Phytophthora sur des chênes suisses. Cette maladie des racines est particulièrement inquiétante vu qu’elle coïncide avec le dépérissement aigu du chêne, provoqué par différentes bactéries. C’est d’ailleurs la première fois qu’une co-infection des deux maladies sur le même arbre est signalée.

Les arbres infectés par la maladie des racines provenaient de zones urbaines où l’espèce Phytophthora cinnamomi était présente. Cette dernière n’était connue jusqu’à présent que comme agent pathogène de la maladie de l’encre du châtaignier. Un des chênes infectés provient du nord des Alpes, ce qui est également préoccupant car les spécialistes pensaient que ce pathogène ne pouvait pas s’y établir en raison des températures trop basses en hiver.

De nombreuses questions restent en suspens, notamment celle de savoir si les chênes meurent plus rapidement en cas de double attaque. Des recherches débuteront début 2024 pour tenter de répondre à ces questions.

Parmi les nombreux bienfaits des forêts, on parle peu de leurs intérêts gastronomiques. Pourtant, une forêt fournit nombre de ressources alimentaires en tous genres : champignons, fruits, baies, sève, miel, insectes, gibier, fibres, etc.

Alors que beaucoup d’aliments forestiers étaient encore consommés jusqu’au dernier siècle, il ne resterait aujourd’hui qu’un million de chasseurs-cueilleurs sur Terre, surtout en forêt tropicale. Pourtant, le concept de forêt nourricière revient peu à peu sur le devant de la scène, notamment grâce à l’essor de l’agroforesterie. Exploiter les produits forestiers non ligneux fournis par sa forêt demande d’encore mieux la connaître, de respecter les saisons et de préserver absolument sa biodiversité et, de facto, ses ressources.

Cela reste un sujet secondaire pour les propriétaires forestiers et les élus, qui pourrait pourtant bénéficier indirectement à la filière bois. Pour en savoir plus, un dossier thématique est paru dans la revue Forêts de France n° 669, avec des conseils de récolte et de conservation ainsi que quelques recettes pour se lancer. À table !

Dans le cadre du Plan de Relance et sur proposition de la Ministre de la forêt Céline Tellier, le Gouvernement wallon a validé l’ensemble des lauréats de la troisième édition de l’appel à projets « Forêt résiliente ». 380 projets, de 253 propriétaires forestiers privés, ont ainsi pu profiter d’un soutien pour orienter un total de 700 hectares de forêts vers une gestion mélangée en âges et en espèces, favorisant ainsi l’adaptation aux dérèglements climatiques.

Cette troisième édition s’achève donc sur un succès. En 3 ans, ce sont 3.858 hectares de forêts (de propriétaires privés et publiques) qui ont bénéficié du soutien « Forêt résiliente ». Une quatrième édition est d’ores et déjà en cours de préparation pour l’année 2024.