Une étude comparative a récemment été menée sur 29 terriers actifs de blaireaux situés dans des chênaies-charmaies-hêtraies du Grand Est de la France, avec pour objectif d’étudier l’effet du mustélidé sur la diversité des communautés végétales. Entre mai et juin 2021-2022, une trentaine d’inventaires floristiques ont été réalisés sur 200 m² autour de chaque terrier, de même que dans des zones non perturbées situées à moins de 100 mètres des terriers actifs. Le recouvrement des strates végétales et l’abondance des espèces herbacées y ont été évalués.
Les principaux résultats indiquent que l’activité du blaireau modifie significativement l’hétérogénéité floristique locale. Les terriers présentent une richesse spécifique globale supérieure, mais un couvert herbacé 2,5 fois moins important que dans les zones témoins. La communauté végétale y est globalement plus eutrophe et nitrophile. Sur les sols limoneux et argileux, les analyses révèlent une meilleure disponibilité en azote et des pH plus élevés sur les terriers. Les espèces favorisées sur les terriers sont principalement des espèces rudérales, dispersées par épizoochorie (36 %) ou endozoochorie (18 %), et tolérant des perturbations de sol importantes. Ce sont par exemple Festuca gigantea, Poa nemoralis, Sambucus nigra et Stellaria media. À l’inverse, certaines espèces forestières typiques comme Anemone nemorosa, Acer platanoides et Quercus petraea sont défavorisées sur les terriers.
L’activité de terrassement du blaireau peut expliquer ces modifications dans les communautés végétales. En remaniant les horizons du sol, le blaireau remonte en effet certains minéraux des couches profondes vers la surface. Le sol présente ainsi un pH plus élevé et une meilleure disponibilité en potassium, calcium, magnésium et phosphore notamment. Les passages répétés et le creusement créent également des zones dénudées où la compétition interspécifique est moins forte, permettant l’installation d’espèces pionnières et rudérales qui remplacent les espèces forestières originales. L’apport de nouvelles espèces pourrait aussi s’expliquer par l’activité de ramassage de litière des blaireaux et l’épizoochorie, le mammifère parcourant de longues distances nocturnes à la recherche de nourriture.