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Forêt.Nature n°134

Évolution des prix de l’épicéa, du chêne et du hêtre en Wallonie de 1960 à 2014

Sami Ben Mena, Didier Marchal, Étienne Gérard

La majeure partie des volumes mis en vente en Wallonie proviennent d’épicéas, de hêtres et de chênes. Le suivi des ventes de bois issu de forêts publiques permet un retour en arrière d’un peu plus de 50 ans sur les prix obtenus pour ces trois essences. L’analyse est basée sur les ventes d’automne réalisées dans les différents cantonnements. Par ailleurs, elle s’intéresse principalement aux bois de trituration et aux sciages, c’est-à-dire aux bois des catégories 40-60 cm et 90-120 cm pour les résineux et aux bois de 120-150 cm et 200-250 cm pour les feuillus. Les prix sont étudiés en euro courant et en euro constant, ce qui permet de tenir compte de l’indice des prix à la consommation (la monnaie a perdu 85 % de sa valeur de 1960 à 2014 : un euro de 2014 vaut presque sept fois moins qu’un équivalent euro de 1960). Les prix du bois d’épicéa ont connu deux événements majeurs : les tempêtes de 1990 et 2000. À ces périodes, le prix a connu une chute très importante. Bien qu’en 2000, la Belgique n’a pas été touchée, les tempêtes ont eu des répercussions sur le marché wallon. L’évolution des prix courants des sciages d’épicéa pourrait laisser penser que les prix ont été multipliés par trois et demi depuis 1960. Cependant, en euro constant, les prix ont été divisés par deux et l’augmentation des prix n’a donc pas compensé l’inflation. Le chêne a connu une forte croissance des prix en euro constant de 1973 à 1978, suivie d’une période stable jusqu’en 2004. Les prix ont ensuite continué de croître, surtout pour les gros bois, et ce jusqu’en 2009 où la croissance a été stoppée nette par la crise. À l’heure actuelle, les prix ont retrouvé leur niveau des années ’80 et ’90 et on peut espérer qu’ils se maintiendront. Enfin, les prix du hêtre ont régulièrement connu des augmentations jusqu’en 1997, en euro courant. Ensuite, les gros bois ont subi une chute vertigineuse alors que les 120-150 cm se sont maintenus. Les prix ont tout de même connu une chute ponctuelle en 1990. Le même constat est fait en 2003, à la suite des ventes de gros volumes de hêtres scolytés. En euro constant, les prix du hêtre ont été divisés par deux pour les gros bois et par 1, 6 pour les 120-150 cm. En 2010, les prix des petits et gros bois étaient même identiques ! À l’heure actuelle les gros bois ne se vendent d’ailleurs qu’une fois et demi plus cher que les petits. Alors qu’ils se vendaient quatre fois plus cher entre 1990 et 2003. L’observation de ces prix permet de distinguer nettement trois types de produits : les sciages de gros bois de chêne qui sont les seuls à avoir conservé un prix largement supérieur aux autres types de bois ; les petits sciages industriels, les sciages résineux et de gros bois de hêtre qui se sont démarqués dans les années ’90 et 2000 ; la trituration de résineux. Si on replace ces informations dans le contexte mondial, il semble qu’on assiste à un redressement de la demande de produits forestiers en 2010, suite à la chute due à la crise économique. Il faut noter également que la Chine joue un rôle considérable dans le marché du bois. Cette analyse montre que le bois est une matière première dont l’augmentation de prix ne compense pas l’inflation et est, principalement pour les gros bois, soumise à des fluctuations de prix importantes. Pour maintenir la rentabilité des forêts, il importe donc que le propriétaire diminue les coûts, en limitant les travaux et en les ciblant sur la qualité. En résineux, les élagages de pénétration ne devraient pas être menés sur tous les bois, sous peine de dépenser plus de 1 000 €/ha, mais plutôt de cibler des élagages à grande hauteur sur une centaine de tiges. Par ailleurs, des éclaircies dynamiques permettent de raccourcir le terme d’exploitabilité et d’augmenter le taux interne de rentabilité. Enfin, les surdensités de gibier pénalisent fortement la rentabilité et les loyers de chasse ne permettent pas de compenser les pertes. Qui plus est, particulièrement dans le contexte actuel, pour que la forêt reste rentable il faudra qu’elle soit résiliente. La diversification des essences, des provenances, des structures de peuplements sont dès lors des objectifs à poursuivre, au même titre que le maintien de la fertilité et de l’état des sols. [S.P.]

Ben Mena S., Marchal D., Gérard E.[2015]. Evolution du prix des bois sur pied d’épicéa, de chêne, et de hêtre, de 1960 à 2014 en Wallonie. Forêt Wallonne 134: 23-34 (12p., 11fig., 10réf.).