Michel Fautsch

Dans la nature, rien n’est figé, tout est dynamique, en mouvement, changeant. Ainsi en va-t-il des vénérables arbres qui forment un paysage immuable à nos yeux et, pourtant, en constante évolution.

En les observant de plus près, ces vétérans de la forêt portent les traces d’une histoire rarement linéaire. Branches mortes, décollements d’écorce, cavités remplies d’eau ou de terreau, loges de pic, champignons exubérants, fissures, etc. sont autant de petits habitats qui colonisent progressivement ces vieux arbres qu’on décide de conserver. De petites irrégularités, accentuées par le temps et qui rendent ces arbres extraordinairement beaux.

Le titre de ce livre fait écho au projet du même nom. Un projet de mise en évidence esthétique des arbres morts et des arbres-habitats par la photographie. Car un « chronoxyle », c’est exactement ça ; un vieil arbre, parfois entièrement creux, à la silhouette tourmentée, tout juste vivant ou à peine mort. Qu’il soit debout ou couché, sa taille imposante lui assure une longévité de plusieurs décennies, même après sa mort. Pendant tout ce temps, un long processus de décomposition va voir défiler un impressionnant cortège d’insectes, champignons, oiseaux et même quelques mammifères. À chacun de ces stades, c’est la beauté du vivant qui marque les esprits. Vulnérable et intimidant à la fois, le chronoxyle nous interpelle, il nous attire, nous relie au monde vivant, au cycle de la vie et au discret retour au sol. Un retour humble mais vital pour les jeunes arbres qui suivent et pour l’ensemble de l’écosystème forestier.